J'ai démarré cette année 2022 par des séances au collège du MONT DUPLAN à Nîmes. Je partage cet article qui complète mon action dans ce collège par des explications.
Thérapie manuelle venue du Japon, le shiatsu peut compléter utilement la prise en charge d’enfants et d’adolescents confrontés à des difficultés psychologiques.
Au milieu de la salle informatique, une fille est assise en tailleur, deux autres allongées sur le ventre. À leurs côtés, deux femmes et un homme leur prennent le pouls, puis entament un massage en exerçant des pressions sur l’ensemble du corps. Ces praticiens de shiatsu interviennent depuis début 2018 au microlycée Villon, dans le 14e arrondissement de Paris, qui accueille une cinquantaine d’élèves décrocheurs souhaitant reprendre leur scolarité. Phobie scolaire, harcèlement, problèmes familiaux, tous ont traversé des moments difficiles. « La plupart souffrent de stress, d’anxiété, de problèmes de sommeil. Ils bénéficient d’une prise en charge médicale et souvent psychologique à l’extérieur, précise Clément Dirson, professeur de français. L’objectif était de leur proposer un accompagnement différent, passant davantage par le corps. »
Soigner à la fois le corps et l’esprit, tel est le but affiché du shiatsu. Cette thérapie manuelle japonaise prend sa source dans l’une des branches de la médecine chinoise, le massage des points d’acupuncture. « La séance commence par la prise des pouls chinois, explique Marie-Séraphine Vincent, l’une des praticiennes. Nous pouvons sentir la qualité des douze méridiens qui relient tous les organes du corps, ce qui nous permet d’orienter notre shiatsu. » Par un enchaînement de pressions rythmées, le praticien régule les flux d’énergie déréglés par les émotions, le stress environnant, les chocs, les excès. Considéré comme un véritable soin au Japon, le shiatsu se « reçoit » comme un traitement libérant des tensions.
En France, où il a été introduit dans les années 1970, il n’est pas reconnu médicalement. Mais il peut s’intégrer utilement à un protocole de soins, estime Bernard Bouheret, kinésithérapeute et fondateur de l’école de shiatsu thérapeutique de Paris, d’où sont issus les praticiens intervenant au microlycée Villon. « Des médecins en France commencent à s’intéresser à cette technique qui considère l’humain comme un tout. Le shiatsu a une vocation préventive, mais soulage aussi bon nombre de douleurs liées notamment aux maladies chroniques, améliore le sommeil, apaise les émotions, a des effets positifs sur tout ce qui est lié au stress et au surmenage. »
Accessible à tous, il convient selon lui très bien aux adolescents
« Le shiatsu se pratique sur des habits légers, et non sur la peau nue : ce n’est pas un toucher intrusif ni sensuel. » À leur sortie de l’atelier, les élèves confirment : « Je ne suis pas une fana des massages, mais là c’est différent », confie Léa, 17 ans, élève en 1re ES. Souffrant de phobie scolaire et de troubles du comportement alimentaire, elle a décroché pendant huit mois. « Grâce au shiatsu, j’ai vraiment compris que je ne suis pas qu’un cerveau, j’ai pris conscience de mon corps. Avant, quand j’étais stressée, je ne me rendais même pas compte que j’avais mal à certains endroits. Les praticiens m’ont indiqué des points de pression pour me détendre et des exercices de respiration. Aujourd’hui, j’arrive à me calmer seule et à m’apaiser. »
« Moi, ils m’ont dit que j’avais tendance à être bloquée au niveau de la “corbeille”, c’est-à-dire de l’estomac. J’ai appris à écouter mon corps pour canaliser mon stress. Et j’avais tendance à avoir mal au dos, ces douleurs ont disparu », ajoute Anaïs, 19 ans, en Tale ES, qui traîne aussi un passé de phobique scolaire. Nour, 20 ans, s’apprête à pénétrer dans la salle pour la séance suivante. Déscolarisé pendant plus d’un an après une addiction au cannabis, il souffre régulièrement de crises d’angoisse. « Aujourd’hui, c’est ma quatrième séance. La première fois, je sentais une crise monter et dans ces moments-là, je déteste qu’on me touche la tête. J’ai failli ne pas y aller. Finalement, ça m’a incroyablement détendu. »
Cinq ateliers, accueillant entre dix et quinze élèves un mardi par mois, ont pu être organisés l’année dernière au microlycée Villon, qui comptait reconduire l’initiative à la rentrée 2018.
Reportage de Karine Hendriks
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